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A Chacun Sa Part d'Ombre

By: Mayia
folder French › Originals
Rating: Adult ++
Chapters: 3
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Reviews: 2
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Disclaimer: This is a work of fiction. Any resemblance of characters to actual persons, living or dead, is purely coincidental. The Author holds exclusive rights to this work. Unauthorized duplication is prohibited.
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A Chacun Sa Part d'Ombre



CHAPITRE 1


« Un jour de plus perdu au profit de l’Education Nationale… » C’est ce qu’il se disait chaque matin en franchissant les lourdes doubles portes boisées qui le menait au couloir principal du lycée. Et dire qu’on était seulement en octobre…il était inscrit dans ce lycée depuis à peine un mois et il s’y sentait déjà prisonnier et exploité. A 14 ans, Maël était ce qu’on appelle un ironiquement un ‘petit génie’. Toujours premier de sa classe, jamais un mot de travers et adulé par ses professeurs. A vrai dire, il n’avait rien d’un génie. Pour lui un génie, c’était quelqu’un comme Einstein, qui avait la science infuse. Lui…lui, il aimait lire, il s’intéressait à tout, il avait l’esprit suffisamment ouvert pour accepter le point de vue de tout le monde, il était toujours prêt à écouter ses amis. Mais c’est surtout sa grande curiosité qui l’amenait à être aussi cultivé. Pour relever le tout, il affichait toujours ce grand sourire chaleureux qui en exaspérait plus d’un mais qui le rendait sympathique aux yeux de tous les autres.

Ce matin comme chaque matin, sa mère l’avait déposé devant le lycée une bonne demi-heure avant l’arrivée en masse des élèves. Elle était infirmière dans une clinique pour enfants et travaillait de nuit, Maël acceptait donc de se rendre plus tôt à l’école pour la laisser aller se coucher dès que possible. En général, elle finissait son tour de garde vers 6h30, de là elle passait directement chercher Maël à la maison et l’emmenait au lycée. Ensuite seulement pouvait-elle aller rattraper le sommeil qui lui manquait. Ce train de vie était assez dur pour eux deux, leurs horaires étaient totalement à l’opposé et ils ne pouvaient passer que quelques heures ensembles en début de soirée. Pourtant ils étaient très complices, le genre de complicité que l’on retrouve seulement chez certaines familles où la mère élève seule son enfant.

Maël jeta un coup d’œil à sa montre, pour voir qu’il n’était effectivement que 7h05. Il replaça son sac à dos sur son épaule et longea le couloir en direction de sa ‘salle d’attente’ personnel. Seul le bruit de ses converses résonnant sur le carrelage se faisait entendre. Un lycée vide c’était flippant…
Il entra rapidement dans une pièce et ferma la porte sur laquelle était écrit ‘salle de musique’. Depuis sa toute petite enfance sa mère avait insisté pour qu’il apprenne à jouer d’un instrument de musique. Vu son âge, son professeur l’avait dirigé vers le piano. Au départ, il y jouait seulement pour faire plaisir à sa mère, mais avec le temps, il avait vraiment pris goût à la musique, et aujourd’hui, il n’était pas rare qu’il joue ses propres compositions.
Une fois entré dans la pièce, il posa son sac sur une chaise située directement à côté de la porte puis se retourna. Un cri lui échappa.

« Désolé, je me croyais seul. » dit-il, une main sur le cœur, à la silhouette juchée près de la fenêtre.

Celle-ci ne se retourna même pas, et se contenta de tirer sur sa cigarette.

« Hum…je crois que c’est interdit de fumer dans l’établissement. » tenta Maël en souriant légèrement.

Un visage se tourna vers lui, impassible, et souffla une bouffée de fumée. Il regarda Maël droit dans les yeux puis perdit à nouveau son regard par la fenêtre. Encore un que l’éternel bonne humeur du garçon tapait sur les nerfs. Maël haussa les épaules et alla s’asseoir sur le tabouret devant le piano. Il ferma les yeux et inspira profondément. Ses doigts se dirigèrent d’eux-mêmes vers le clavier, et bientôt les premières notes de ‘Moonlight Sonata’ de Beethoven résonnèrent dans la pièce. Lent et mélancolique, ce morceau était un des favoris de Maël.
Plongé dans les profondeurs de sa musique, il n’entendit pas l’autre garçon soupirer et quitter sa place près de la fenêtre. Il ne sortit de sa torpeur que lorsqu’il sentit le courant d’air provoqué par l’ouverture de la porte soufflait insidieusement dans ses cheveux blonds. Il stoppa et tourna la tête vers la sortie. Ses prunelles noisettes rencontrèrent celles bleus de l’autre garçon. Sorti de la pénombre, il pouvait à présent clairement voir son locuteur. Habillé essentiellement de noir et les cheveux courts noirs eux aussi, contrastant avec ses yeux bleu-gris. Il était plus grand que Maël, (« mais en même temps qui ne l’étais pas ? » pensa le blondinet) mais pas beaucoup plus, Maël faisait 1m60, ce qui devait amener l’autre garçon à 1m75…

« Tu veux ma photo ? »

L’interjection surpris Maël, et il sortit de ses pensées. Ecrasé par le regard froid du garçon aux cheveux noirs, il rougit, gêné d’avoir était surpris à le regarder comme ça.

« Pa…pardon, je voulais pas… » Commença-t-il en riant nerveusement.
« On dit que les musiciens révèlent leur véritable personnalité dans leur musique…tu dois pas être si joyeux que ça…mais tu joues bien. »

Sur ces dernières paroles il sortit et ferma la porte derrière lui, laissant un Maël complètement abasourdi dans la salle.
Les yeux écarquillés et la bouche légèrement entrouverte, le blond resta coi à contempler la porte. Trop troublé pour continuer à jouer, il se contenta de fixer les touches jusqu’à ce que la sonnerie de début des cours retentisse.

Durant toute la journée, les mots prononcés par le garçon ténébreux, comme Maël en était venu à l’appeler, se rejouèrent dans sa tête. « Tu ne dois pas être si joyeux que ça », comment ça il n’était pas joyeux ? Il faisait le but de toute sa vie de ne pas laisser des sentiments négatifs dicter sa conduite…il y avait déjà assez de gens déprimés sur terre, et lui aimait bien aller à contre-courant. « Tu ne dois pas être si joyeux que ça ». Argh ! Mais de quel droit il lui disait ça, lui qui ne portait que du noir, la couleur du deuil, comment pouvait-il minimiser quelqu’un comme ça ?
De rage, il griffonna la feuille sur laquelle il venait de finir d’écrire ses exercices d’anglais puis se prit la tête dans les mains. Assis à son bureau, son professeur le regarda en levant un sourcil, puis replongea dans sa lecture. Après tout, même les petits génies avaient parfois quelques difficultés.


Le lendemain matin, Maël se réveilla en entendant la voiture de sa mère se garer dans l’entrée. Il leva légèrement la tête de son oreiller et tenta de voir les chiffres lumineux de son radio réveil au travers du voile de sommeil qui flottait encore devant ses yeux. 5h42. Il grogna et re-enfoui son visage dans l’oreiller. Depuis toujours il avait l’habitude de dormir sur le ventre.
Des bruits de clefs lui indiquèrent que sa mère venait de rentrer dans la maison. Il l’entendit monter les marches menant au premier étage, et discrètement ouvrir la porte de sa chambre. Il sourit dans son coussin en l’entendant avancer à pas feutrés. Puis dans un geste tout maternel, il sentit sa main caresser ses mèches dorées.

« Bonne nuit soleil de ma vie. » Elle déposa un baiser sur ses cheveux puis sortit, certainement en direction de sa propre chambre.
Avec un soupir de bien être, Maël se laissa à nouveau submerger par le sommeil.

Il fut à nouveau tirer du pays des rêves quelques heures plus tard mais cette fois par des grattements et couinements derrière sa porte. Pendant un instant, il pensa ignorer ces bruits et finir sa grasse matinée mais son cœur prit pitié des gémissements de tristesse lâchés par le labrador sable.

« Oui Fenrir, j’arrive… »

Il roula hors des couvertures et avança au radar jusqu’à la porte. D’un bond, le chien se jeta sur lui, les pattes avant sur ses épaules et lui lécha affectueusement le visage. Pas vraiment réveillé, Maël le laissa faire et se contenta de s’essuyer d’un revers de main une fois le chien à terre.
Il avança dans le petit hall et prit le chemin de la chambre de sa mère. Il jeta rapidement un coup d’œil à l’intérieur et vit qu’elle dormait profondément. Il referma la porte pour s’assurer que Fenrir n’irait pas la réveiller puis descendit à la cuisine.
Pas motivé pour se faire un vrai petit déjeuner, il se versa simplement un verre de jus de pamplemousse et attrapa un paquet de gaufres toutes faites dans le garde-manger.
Une gaufre dans la bouche, il mis deux tranches de pain dans le toaster, sortit de la confiture et du miel, une tasse et une assiette qu’il posa sur la table puis mis la cafetière en route, certain que l’odeur du café n’allait pas tarder à réveiller sa mère. Il n’oublia pas de remplir la gamelle du labrador de ses croquettes préférées.
Satisfait de son travail, il fila dans la salle de bain prendre une douche rapide. Une fois lavé et séché, il retourna dans sa chambre. Il enfila un short gris au dessus dans son boxer puis passa un tee-shirt orange sans manche au dessus de sa tête. Il descendit ensuite les marches quatre à quatre, attrapa une veste de sport marron et une paire de Vans délavée dans la penderie où ils rangeaient toutes les vestes et chaussures, puis ouvrit le tiroir du petit meuble situé dans l’entrée pour en sortir la laisse de Fenrir.
Tout son attirail en main, il entra à nouveau dans la cuisine, embrassa sa mère à présent levée sur la joue et alla tapoter la tête de son chien.

« Allez viens Fenrir, on va promener ! »

En entendant ces mots, le chien se mit à sauter sur place en jappant de joie, Maël lui tendit la laisse qu’il attrapa dans sa gueule puis partit en courant attendre devant la porte. Le blondinet sourit en secouant la tête puis entreprit de rejoindre le chien. Sa mère l’agrippa par la taille au passage et le sera dans ses bras.

« Merci pour le petit déjeuner mon cœur » lui dit-elle en le relâchant mais en attrapant son visage entre ses mains, elle le regarda dans les yeux « Tu as mangé quelque chose Maëlys ? Tu sais que ta glycémie descend très bas pendant la nuit. »

Il leva les yeux au ciel, c’était dur d’avoir une mère poule infirmière.

« Oui Maman, ne t’inquiètes pas, j’ai fais attention à ma glycémie. » dit-il d’un ton cadencé comme un petit garçon qui répète les paroles d’un adulte pour l’énerver.

« On ne plaisante pas avec sa santé, fils ! » le sermonna-t-elle gentiment « Fenrir t’attends, tu sais qu’il n’a aucune patience. »

Elle le lâcha pour attraper sa tasse de café. Maël rejoignit le labrador, accrocha la laisse à la boucle prévue à cet effet sur son collier puis sortit de la maison. Le soleil était déjà haut dans le ciel, et une petite brise rafraîchissait ses rayons. Une parfaite matinée pour un samedi d’été indien.
Le petit blond laissa Fenrir le traîner le long du trottoir pavé. La dernière fois qu’il avait regardé l’horloge, il était 10h50 et il venait de sortir de la salle de bain. Il ne fut donc pas étonner de voir le quartier commençait à s’animer. Leur vieux voisin, Mr Gibson, était déjà entrain de travailler dans son jardin, coupant les plus belles fleurs de ses immenses rosiers. En voyant Maël passer devant chez lui, il lui adressa un petit geste de la main avant de crier :

« Tu passeras me voir en revenant Maël, j’ai un gros bouquet de roses fraîchement coupées pour ta maman ! »

Maël lui rendit son geste en acquiesçant vigoureusement. Il traversa la route tranquillement, la circulation n’était pas très dense sur cette voie, et quitta les chemins bétonnés pour ceux terreux du petit bois à l’extrémité du quartier. Là, il retira sa laisse à Fenrir pour le laisser vagabonder librement. Il savait que d’autres promeneurs seraient là étant donné que le parcours de santé traversait ces bois, mais tout le monde savait que le labrador lui appartenait donc il ne craignait pas qu’on le prenne pour un chien errant.
Il fit le tour du parcours deux fois puis siffla son chien, lui faisant comprendre qu’il était l’heure de rentrer et donc de le rattacher. Sur le chemin du retour, ils passèrent par le square où quelques amis de Maël avaient l’habitude de venir jouer au basket. La plupart des ses amis était fou de sport, foot, basket, hockey…Comme n’importe quel garçon de 15 ans dira-t-on. Mais lui n’avait aucunes affinités avec aucun sport. Comme tout gamin, il avait joué au foot dans la cour de récré mais il n’avait jamais poursuivi dans cette voie. Il n’était pas vraiment sportif, à vrai dire, à part la marche à pied lorsqu’il promenait Fenrir, il n’en faisait pas du tout. Une chance qu’il n’ait jamais eu grand appétit, avec toutes ces histoires sur la recrudescence de l’obésité…
Quoi que gagner quelques kilos ne lui ferait pas de mal, il avait toujours était mince, pas maigre au point de voir ses côtes à travers ses tee-shirts moulants, mais vraiment fin et sans le moindre muscle. Enfin c’était exagéré, il avait tout de même une poigne assez forte, il fallait bien ça pour retenir Fenrir.
Perdu dans ses pensées, il passa devant le square sans s’en apercevoir. Il ne remarqua pas non plus la petite bande plus ou moins assise sur un des bancs qui entourait l’espace déterminé du square. Quatres jeunes, un peu plus âgés que lui, trois garçons et une fille, tous habillés quasiment que de noir. C’était la seule fille du groupe qui se démarquait le plus, avec sa robe noire en dentelle surplombait par un corset mettant en valeur sa taille fine et sa poitrine, et son maquillage entièrement noir lui aussi. En voyant Maël passer devant eux sans leur accorder le moindre regard, elle se leva de sa position assise sur le dos du banc et un étrange sourire aux lèvres, s’avança rapidement mais silencieusement derrière Maël.

« Hé Blondie, on est pas assez bien pour que tu daignes nous saluer ? » dit-elle avec une voix et un air hautain, les bras croisés sur sa poitrine.
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