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les princes sorciers

By: Alb
folder French › Originals
Rating: Adult
Chapters: 32
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Disclaimer: This is a work of fiction. Any resemblance of characters to actual persons, living or dead, is purely coincidental. The Author holds exclusive rights to this work. Unauthorized duplication is prohibited.
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le calme avant la tempête

21. Le calme avant la tempête

Bambi se retrouve avec une part de pizza et une bière, exactement à l’endroit qu’il occupait peu de temps auparavant.
Le réfrigérateur regorge de victuailles tout comme le congélateur et l’armoire à provisions.
- De quoi tenir une petite semaine avec des goinfres comme vous, a dit son oncle en contemplant les boites de conserves et les paquets rangés sur les étagères.
Bambi se contente d’un sourire.

Son oncle est professeur d’université. Il enseigne l’histoire et est spécialisé dans l’antiquité grecque. Il a même collaboré à un ouvrage sur l’éducation dans les cités hellènes.
Lorsque son regard se pose avec insistance sur son neveu et que ses yeux soupirent, on devine pourquoi le sujet le passionne. Bambi se sent à la fois irrité et flatté, se demandant s’il doit apprécier le regard qui se fixe sur la courbure de ses reins et ses fesses lorsqu’il se penche pour poser le carton qu’il vient de porter.
Comme d’habitude, il fait semblant de ne rien remarquer. Il ne craint rien. Pour son oncle, il n’est qu’un fantasme qui nourrie sa vie sexuelle et dont seule sa femme profite pleinement.

Il y a son fils. Il est assis à côté de Bambi et dévore la pizza à toute vitesse, tout en buvant de la bière. C’est un garçon sans problèmes qui aime la vie et déteste tout ce qui est compliqué.
Pour l’instant, il ne pense qu’au film d’horreur qui l’attend au salon, devant le lecteur de DVD. Une histoire de morts-vivants, le genre dont il raffole.

Il y a sa femme. Elle est comme l’eau : inodore, incolore et sans saveur. D’une certaine façon : parfaite. Bambi se doute bien qu’elle est plus que ça, mais elle le cache. C’est comme si elle considérait que son rôle, maintenant qu’elle est épouse et mère, nécessite de sa part qu’elle sacrifie sa personnalité. Elle est sans reproche, mais Bambi ne l’aime pas. Si elle le pouvait, elle paverait sans vergogne son enfer personnel de toutes ses bonnes intentions. Il ne la laisse pas faire.

Il y a sa fille qui grignote du bout des dents une part de pizza, les yeux baissés vers le sol et qui lève de temps à autre un regard mélancolique vers son cousin préféré. Si leurs regards se croisent, un superbe sourire s’affiche sur son visage. Dans le cas contraire, elle garde son air morose et s’abîme à nouveau dans la contemplation obsessionnelle de ses chaussures.
Bambi devine les effrois qui l’habitent, si proches des siens.
Il ne peut s’empêcher de lorgner les deux petits seins qui ne demandent qu’à s’épanouir, à l’examiner sous toutes les coutures, à la recherche de la différence.
Lucille est la seule qui arrive à lui faire oublier son rêve. Il est certain que si Zhio ne venait pas le hanter chaque nuit, ce serait elle qui l’attendrait dans ses rêves.
Elle l’attend aussi dans le monde réel, se dit-il. Un signe de sa part suffirait, mais il n’ose pas le faire.
Comment ça fait d’être avec une fille ? se demande le jeune garçon en la contemplant.
Il se sent aussitôt coupable, comme si Zhio venait de le gronder. Les filles, ce n’est pas pour toi. Voici ce qu’il vient d’entendre dans sa tête.
Mais ce n’est qu’un rêve, se dit-il aussitôt. C’est absurde. Zhio n’existe pas. En tout cas pas autre part que dans sa tête. C’est ce qu’il croit. Non, c’est plutôt ce qu’il veut croire, et aussi ce qu’il n’arrive pas à croire, même si c’est idiot.
Il n’arrive pas plus à croire ce qui vient de se passer entre lui et Lucas. C’est tout aussi irréel et stupide. Pourtant, c’est vrai.
Lucas l’aime ? Il n’a pas beaucoup avancé. Il en est toujours à : Ah bon ?
Ce qui est certain, c’est qu’il a fait de la peine à son meilleur ami. Ça l’ennuie.
Il doit m’en vouloir, se dit-il. C’est idiot. Je me suis mal expliqué, c’est tout.

Son cousin parle. Depuis combien de temps ? Bambi l’ignore.
Il le regarde avec surprise, comme s’il venait d’apparaitre brusquement, sans prévenir, craché par le néant. Il a presque envie de lui demander : T’es qui, toi ?
Ils ont pratiquement le même âge, vont au même lycée, dans la même classe, habitent au même endroit, connaissent les mêmes personnes, et pourtant, il lui est aussi étranger qu’un extraterrestre.
- Il parait qu’un zombie bouffe un bébé, fait Benjamin, la bouche pleine à ras bord de pizza. Ça doit être trash un max. J’ai pris le collector. Ils expliquent comment ils ont fait le trucage… Au début, c’est un vrai bébé.
- Oui, murmure Bambi, subitement affolé par le gouffre qui les sépare.
Sa cousine lui lance un nouveau regard. Il se force à lui sourire, tout en se demandant : Qu’est-ce que je fais ici ? Ce n’est pas ma place. Je n’ai pas à être ici.
Mais elle est où, sa place ? A Barcelone, avec son père ? Sur l’île où sa mère creuse le sol en quête d’un passé si lointain que personne ne se rappelle même qu’il faut s’en souvenir ?
Avec Zhio ?
C’est un rêve, se dit-il aussitôt. Il n’existe pas.
Il laisse échapper un soupir.
Pourquoi Lucas s’est-il enfui sans lui laisser le temps de s’expliquer ? En restant, il l’aurait forcé à répondre à son : je t’aime. Ça l’aurait obligé à se regarder en face et chercher la réponse au fond de lui, la réponse à ces questions essentielles : Qui veut-il aimer ? De qui accepte-il d’être aimé ?
Je t’aime.
Ah bon ?
Quelle réponse ridicule à une déclaration d’amour, d’où qu’elle vienne. Exactement de la même nature que ces sourires crispés et hypocrites dont il abreuve sa cousine. Faut s’appeler Bambi pour oser ça : Ah bon ? songe-t-il, écœuré.

Son cousin parle toujours du film d’horreur qu’il est impatient de regarder. Bambi se demande s’il va le voir avec lui ou aller chez Lucas afin de se réconcilier avant qu’il ne soit trop tard.
Et s’il me propose de faire l’amour ? se dit-il avec un hoquet de panique. Je fais quoi ? Là, ça sera pour de vrai, pas comme dans mon rêve, avec Zhio.
Son corps se recouvre instantanément de sueur.
- Tu n’es pas bien ? s’écrie Lucille.
Dans son regard brûlent deux lueurs contradictoires. L’une d’inquiétude, l’autre d’espoir. A défaut de jouer au docteur, elle est prête à jouer à l’infirmière.
- Non, hurle Bambi, en jetant le bout de pizza à lequel il s’agrippait le plus loin possible.
- Qu’est-ce qui t’arrive ? fait Benjamin, oubliant les zombies.
- Rien, laisse échapper Bambi d’une voix misérable.
Il se lève.
- Je vais prendre l’air, murmure-t-il.
- Tu veux que je t’accompagne ? demande Lucille.
Lui ne sait que répondre. Alors, il s’assied et prend sa tête entre les mains.
Benjamin hoche la tête avant de déclarer :
- Je ne connais pas le problème, mais la solution, je l’ai…
Et il se met en devoir de rouler un joint.

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